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Face à l'augmentation de la puissance de calcul des machines de minage et au coût croissant de l'électricité en France, les mineurs particuliers de bitcoin se font de plus en plus rares.
Aujourd'hui, il n'existe aucun chiffre sur le nombre de mineurs particuliers en France. Et pourtant, la France ferait face à un paradoxe: il existerait de moins en moins de mineurs de bitcoin en France, alors même que l’intérêt des Français pour les cryptomonnaies est grandissant.
En effet, selon une étude de l’association pour le développement des actifs numériques (Adan), 8% des Français posséderaient des cryptomonnaies et 30 % aimeraient investir dans ces actifs dans l’année.
Si un particulier cherche à obtenir des cryptomonnaies, et notamment du bitcoin, il n’existe pas beaucoup d’options: soit il faut en acheter (en général sur une plateforme d'échanges de cryptomonnaies), soit il faut "miner" du bitcoin.
"Les particuliers ne minent pas de bitcoin en France, ou vraiment à la marge. D’abord l’électricité y est trop chère pour monsieur tout le monde, et surtout miner du bitcoin nécessite des machines spécifiques (Asics) particulièrement lourdes à gérer dans un environnement domestique. Ceux qui minent à domicile font plutôt le choix de miner des Altcoins (NDLR : des cryptomonnaies autre que le bitcoin, comme l'ether), avec des cartes graphiques, beaucoup moins contraignantes à utiliser à la maison", explique à BFM Crypto Sébastien Gouspillou, le patron de la société BigBlock.
Les machines Asics (pour “Application-specific integrated circuit”) sont composées de puces programmées pour réaliser des calculs complexes. En tournant 24h sur 24h, elles permettent aux mineurs qui sécurisent le réseau Bitcoin d’être rémunérés en bitcoins. Dans la plupart des cas, ces machines sont installées dans ce que l’on appelle des "fermes de minages", mais certains particuliers peuvent décider de s'en procurer, pour miner eux-mêmes des bitcoins en faisant du "solo mining". Concrètement, cela revient à valider un bloc du réseau Bitcoin tout seul. Une technique marginale, mais qui existe un peu partout sur la planète. Pour rappel, un peu comme un livre numérique, la blockchain (ou chaîne de blocs) regroupe tous les blocs (transactions) d'un réseau, du plus ancien au plus récent.
Admettons qu'une personne décide de se lancer dans le solo mining avec une machine Asic, quels sont les investissements de base à réaliser, et quels facteurs prendre en compte?
Pour qu'une machine de minage puisse devenir rentable pour un particulier, de nombreux facteurs sont à prendre en compte. D’une part, il y a un premier investissement économique, puisqu'une machine vaut à ce jour dans les 10.000 dollars. Le prix de la machine de minage peut d'ailleurs changer, en fonction de la consommation électrique et de la puissance de hash (TH/s) de la machine, c’est-à-dire la puissance de calcul de la machine: globalement, plus elle est puissante et consomme moins d’électricité, plus elle sera chère et inversement.
Mais il existe d'autres facteurs: celui dit de la "difficulté de minage" c'est-à-dire que plus il y a de mineurs sur le réseau Bitcoin, plus la quantité de cryptomonnaies se réduit, ainsi que les périodes de "halving" du bitcoin, qui implique que tous les quatre ans, les récompenses en bitcoins sont divisées par deux (soit "half" ou moitié en anglais, d'où le terme de "halving"). Aujourd'hui le "block reward" est de 6,25 bitcoins pour un bloc miné, mais avec l'énorme concurrence entre les mineurs, les chances de miner ce bloc sont évidemment de plus en plus rares.
Enfin, le critère le plus important est évidemment le coût de l’électricité dans le pays où l’on souhaite miner. Les machine étant très énergivores, c’est de ce critère que dépendra notamment le rendement pour un particulier. Et le prix de l'électricité en France peut en décourager plus d'un.
"Aujourd’hui, un particulier va perdre de l’argent"
"Avant la chute du bitcoin, on pouvait dire qu’en général un mineur pouvait rentabiliser son activité en deux à trois ans en France, notamment quand le cours du bitcoin était autour des 50.000 dollars. Aujourd’hui, un particulier va perdre de l’argent car le cours est plus bas et l’électricité en France est plus chère", explique à BFM Crypto Laurent Pignot, analyste chez Zonebourse.
Quelques sociétés françaises proposent encore à la vente des machines de minage pour les particuliers, comme Feel Mining. Mais d’autres sociétés ont fait le choix de ne plus les vendre à des particuliers. C’est le cas de la société Just Mining, qui a décidé il y a deux ans d'arrêter de le faire, pour des raisons stratégiques. Désormais, ce sont leurs partenaires qui s'occupent de telles ventes, nous a confirmé son fondateur Owen Simonin.
Alors, quelles sont les autres alternatives pour les Français qui souhaitent miner du bitcoin? Un particulier peut décider de rejoindre un pool de minage, où des entreprises décident de combiner leur puissance de calcul pour miner du bitcoin. Les bénéfices tirés des pools de minage seront divisés par le nombre de personnes dans le pool.
Un particulier peut aussi devenir propriétaire, à distance, de machines de minage, en participant à un pool de mining. C’est le cas de Léo, qui travaille dans une start-up en France, et qui a acheté trois machines de minage à la société Gwensas, qui s'en occupe à l'étranger. Ce dernier s’est notamment mis à miner il y a un an, dans le but de pouvoir participer à la sécurisation du réseau Bitcoin.
"Selon moi, miner du bitcoin en France, avec le prix actuel de l’électricité, est un non-sens écologique. C’est pour cela que j’ai dès le départ choisi de miner du bitcoin avec de l’énergie verte dans des pays où l’électricité est moins chère. Un an après m’être lancé dans le mining, je pense que je continuerai à miner, cela aide à la sécurisation du réseau Bitcoin", explique ce dernier.
Gwensas fait tourner ses machines au plus près des sources d’énergie green, au Kazakhstan et au Congo, où l'électricité est à 0,05 dollar par kWh (kilowattheure). Cette société achète de l’électricité qui est produite mais qui n’est pas consommée, ce qui permet notamment de réaliser certains projets dans des régions en voie de développement. Par exemple au Congo, le mining a un impact local pour financer la préservation du parc Virunga.
Léo explique d’ailleurs avoir investi dans plusieurs machines, car "il y aura toujours certains aléas techniques, environnementaux ou encore politique qui feront qu’une machine peut tomber en panne".
3.841 dollars à l'étranger, contre une perte de 161 dollars en France
Son investissement est-il plus rentable qu'en France? Prenons un exemple. Ce dernier a notamment acheté une machine de minage, dont la puissance de hash est de 110 Th/s, qui consomme 3250 Watts et qui coûte environ 9.000 dollars.
De nombreux sites permettent de calculer la rentabilité des mineurs en fonction de l'électricité utilisée sur place, ainsi que du cours actuel du bitcoin.
En France, au prix de l'électricité actuel de 0,17 euro/kWh (soit 0,18 dollar/kWh) et au cours actuel du bitcoin ce mardi, le rendement actuel serait négatif avec une perte de 161 dollars sur un an selon les estimations du site Cryptocompare. Tandis que le profit théorique de Léo, qui est en pool de mining, serait de 3.543 dollars par an pour une machine au Congo ou au Kazakstan où l'électricité est à 0,05 dollar par kWh. Ce dernier considère notamment qu'il n'obtiendra que 86 % du rendement de sa machine au lieu de 100 % en raison des aléas évoqués plus haut. Ainsi, selon ses calculs, son gain serait de 3.543 dollars x 0,86 = 3.046 - 15 % de frais pour rémunérer Gwensas, soit 2.590 dollars.
Plus précisément, voici la formule mathématique pour calculer la production théorique d’une machine par rapport à sa puissance: Bitcoin/seconde = Hashrate x (1 - frais du pool) x 2^32 x difficulté de minage x block reward
Au delà ce calcul d'un rendement théorique sur une année, qui dépend fortement de la variation du prix du bitcoin, un autre facteur est à prendre en compte: celui de l'amortissement des machines de minage. Selon Léo, sa machine de minage ne sera pas amortie entre 13 et 15 mois comme le précisent les fournisseurs, mais plutôt d'ici 3 ans au cours du bitcoin actuel. Il lui faudra donc 3,4 années, soit 41 mois, pour amortir sa machine.
Dans un contexte de perturbation sur le marché des cryptomonnaies, le rendement reste particulièrement bas pour les mineurs. Pour illustrer un peu plus les chiffres, une machine de 100 TH/s génère en moyenne 0.008321 bitcoin de production nette par mois. Donc pour un amortissement sur deux ans d’une machine achetée 9.000 dollars, avec le hashrate d’aujourd’hui et un kilowattheure à 0,05 dollar, il faudrait un bitcoin à... environ 45.000 dollars.
Enfin, pour calculer la rentabilité du minage sur un cycle entier d'investissement, il faudrait prendre en compte l'argent récupérable si le mineur se décide à arrêter sa production et à revendre ses machines, si cela est possible. Ce qui là encore est très variable.
"Miner du bitcoin, j'y ai renoncé"
Dans ce contexte, au lieu de miner du bitcoin, les particuliers se tournent vers d'autres cryptomonnaies, relativement "plus simples" à miner que cet actif. C'est notamment le cas de Jimmy, qui s'est lancé dans le minage chez lui, il y a deux ans.
Mais dès le départ, il a abandonné l'idée de miner du bitcoin. Avant il mettait à disposition la puissance de calcul de son ordinateur pour aider la recherche médicale (le Folding@home). Et c'est dans ce contexte, qu'il a découvert un projet de cryptomonnaie qui y était adossé.
"Miner du bitcoin, j'y ai tout de suite renoncé. La puissance de calcul nécessaire pour miner du bitcoin est extrêmement importante. Par ailleurs, le matériel pour miner du bitcoin est beaucoup trop spécifique", explique ce dernier. Il mine donc de l'ether depuis près de deux ans, utilisant un ordinateur où il a branché 30 cartes graphiques, qui fonctionne aussi avec un pool de minage. Tout cela lui a coûté 30.000 euros en deux ans.
"En terme de rentabilité, cela est très variable en fonction de la volatilité des cryptomonnaies, mais je peux obtenir jusqu’à 3.000 euros par mois en passif. Là, je tourne plutôt autour de 1.000 euros par mois. Il m’a fallu entre 11 et 13 mois pour rembourser mon matériel", précise-t-il.
Ce dernier admet par ailleurs que miner en France, quand on est un particulier est une réelle source de contraintes. Ses problématiques sont les mêmes pour ceux qui s'aventurent dans le minage d'autres cryptomonnaies, le bitcoin amplifiant donc cette tendance.
"Ma consommation d’électricité est passée de 75 euros par mois à plus de 500 euros par mois. Ensuite, les cartes graphiques génèrent beaucoup de chaleur donc dans le bureau où je les ai installées, il peut faire plus de 42 degrés, cela implique d'aérer en permance. Ensuite, cela génère du bruit et nécessite de l'entretien", reconnaît-il.
Author: Elizabeth Hill DDS
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